Le béton de chanvre et autres solutions constructives à base de chaux ont le vent en poupe. En est-il de même en ce qui concerne les utilisations à l’horizontale ?
Yannic Santandreu : Absolument, et ce, depuis plus de 20 ans déjà… En fait, l’utilisation à l’horizontale s’est faite dès la naissance du béton de chanvre. Ce fut même la première application à avoir été mise en œuvre. Il s’agit d’une excellente alternative aux solutions de bétons dits “légers”, c’est-à-dire formulés sur la base d’un ciment, d’un sable et de billes de polystyrène. Avec une densité de 375 kg/m3contre environ 550 kg/m3pour un béton classique léger, le béton de chanvre est parfait pour les emplois en aménagement de combles. Ou là où il faut réduire les surcharges. En résumé, le béton de chanvre est plus léger, plus sain et plus noble.
Quelles sont d’ailleurs avec précision les différentes utilisations des solutions à base de chanvre à l’horizontale ? Comment se présente l’offre BCB Tradical à ce niveau ?
Y. S. : On peut distinguer plusieurs usages, même si le produit mis en œuvre ne bouge pas beaucoup dans sa formulation. On est toujours sur un mélange de chaux et de granulats de chanvre, ce qui permet la fabrication d’un béton de chanvre. Côté applications, nous parlons de chape isolante, de ravoirage ou de dalle sur empierrement. En fait, les terminologies vont dépendre des épaisseurs mises en œuvre ou encore des appellations locales. Notre but est de parler le même langage que les utilisateurs de nos produits. Pour faire simple, toutes les applications horizontales du béton de chanvre sont réunies sous le vocable “chape”.
Notre liant de base est la Tradical PF 70. Ce produit a été lancé dans les années 1990 pour les utilisations en “béton de chanvre”. Bien entendu, ce liant est aussi utilisable pour la formulation de mortiers plus classiques, c’est-à-dire avec du sable. Nous avons aussi développé la Tradical Thermo, qui est une évolution de la PF 70, pour une utilisation optimisée en murs et en chapes à capacité isolante. D’un point de vue markéting, le “T” initial reprend le graphisme d’un “7” et le “O” final se confond avec un zéro. La parenté avec le FP 70 devient évidente.
Dans ce contexte, pourriez-vous nous rappeler ce qu’est le béton de chanvre exactement ?
Y. S. : Le terme “béton” peut être trompeur. Quand l’utilisateur pense “béton”, il imagine un produit mouillé et fluide. Le béton de chanvre ne se présente pas ainsi. Le produit ne doit pas être fluide, mais plutôt présenter une consistance de “terre humide”. Il est donc indispensable de bien respecter le dosage en eau prescrit par la notice technique.
Qu’est-ce qu’on l’on peut mettre par dessus un sol en béton de chanvre ?
Y. S. : Ce type d’ouvrages accepte trois types de revêtements : les finitions souples et stratifiées, les carrelages et les parquets. Dans le premier cas, il est indispensable d’intercaler une chape de compression entre le béton de chanvre et le revêtement. Cette chape sera formulée sur la base du même liant chaux, mélangé avec du sable pour rester cohérent au niveau de la réalisation. Son objectif est de créer une surface, assurant la répartition des charges ponctuelles et de pallier les phénomènes de poinçonnement.
La catégorie des carrelages sous-entend aussi les revêtements durs en grès cérame, en terre cuite et en pierre naturelle. La mise en œuvre se fait directement sur le support en béton de chanvre, en pose scellée ou en pose collée. Le point à surveiller est de s’assurer que le béton de chanvre puisse avoir un échange hygrique avec son environnement sur au moins une de ses 2 faces, d’où l’intérêt de le mettre en œuvre sur un empierrement par exemple.
Dans le cas des parquets, la pose peut être flottante, sur sous-couche de désolidarisation, collée ou fixée mécaniquement sur lambourdes.
Vous avez parlé d’application en chape isolante. Mais cette solution est-elle compatible avec le chauffage par le sol ?
Y. S. : Tout à fait, mais pas de la manière que l’on pourrait le penser. En fait, dans ce cas précis, la chape à base de chaux et de chanvre permet de remplacer l’isolant qui est mis en place sous le futur plancher chauffant. Ce dernier sera, quant à lui, noyé dans une chape fluide classique. Pour sa part, le béton de chanvre n’est pas destiné à enrober des tuyaux de chauffage par le sol.
Y. S. : Ce sont les Règles professionnelles d’exécution des ouvrages en béton de chanvre, qui encadrent la mise en œuvre de ce type de solutions. Ces Règles ont été publiées dans une première version en avril 2007, avant d’être amendées en juillet 2012. Et acceptées par la commission Prévention produits de l’Agence Qualité Construction. A l’heure actuelle, elles font l’objet d’une révision en vue d’un élargissement technique et d’une publication sans doute en 2019.
Côté applications horizontales, les règles sont celles du DTU 26.2 – Travaux de bâtiment – Chapes et dalles à base de liants hydrauliques.
Beaucoup d’entreprises sont ainsi censées savoir mettre en œuvre ce type de solutions ?
Y. S. : Tout maçon possède le savoir-faire pour utiliser un béton de chanvre. Toutefois, le mot “chanvre” est parfois bloquant par rapport à des constituants, tels que le sable et le granulat… Côté technique, la mise en œuvre est comparable à celle d’un béton classique, avec même un bel avantage : le béton de chanvre étant moins dense, il est moins éprouvant à mettre en place.
Propos recueillis par Frédéric Gluzicki