Sommaire du dossier :
- Mousse polyuréthane projetée : Les applicateurs répondent
- Des sinistres à répétition
- Une épreuve pour la réputation et le mental
Mais pour chacun d’eux, l’histoire va se dégrader. « Tout a commencé en 2019, indique Paulo Santos (DS Chape). Nous avons ressenti un changement au niveau de la mousse. Elle était différente à l’utilisation, sans que l’on comprenne pourquoi. Nous avons appelé Mirbat, qui nous a confirmé qu’il n’y avait pas de changement, que la mousse était bien issue d’un produit BASF, comme cela nous était facturé. Ils sont venus vérifier nos machines. Tout était dans la norme, donc nous avons poursuivi ainsi. »
Mais en 2021, des clients appellent Paulo Santos. « Nous avions un souci sur deux chantiers. Il y avait un vide entre le carrelage et les plinthes, la mousse avait bougée. Je me suis déplacé pour constater les sinistres et j’ai déclenché les procédures auprès de mon assurance. Je me suis aussi rapproché de Mirbat qui s’est aussi déplacé pour voir les chantiers. Nous avons décidé de faire le nécessaire pour les réparations. »
Mais l’année suivante, les appels de client s’enchaînent. « Au total, j’ai une vingtaine de chantiers où il y a eu des problèmes. J’ai donc multiplié les déclarations d’assurance pour des chantiers qui avaient été réalisés à la même période, en août et septembre 2019. Nous avons fait des analyses avec des laboratoires indépendants, sous constat d’huissiers. Et il s’avère que la mousse que nous utilisions n’était pas produite par BASF et qu’elle était d’une qualité médiocre. » Malgré tout, il fallait assumer auprès des clients. « Certains d’entre eux ont déclenché des procédures d’assurance, d’autres sont aujourd’hui en justice. Mais tous ces chantiers ont un point commun : les analyses montrent que la mousse commercialisée n’est pas conforme à ce qui nous a été vendu. »
Les chantiers s’affaissent, les sinistres s’additionnent
« J’ai eu une vingtaine de chantiers sinistrés, souligne Renaud Racenet (Chape 70). Ce sont des chantiers qui ont été réalisés entre le 10 janvier et le 10 mars 2022, avec des sinistres qui se sont déclarés six à sept mois plus tard. Bien entendu, la première question que l’on s’est posée était : “Est-ce notre faute ?” Nous avons donc repris les procès-verbaux et les échantillons de chantier et nous avons fait analyser l’ensemble. Très vite, Mirbat nous a dit qu’il y avait eu une pollution chez eux et qu’elle concernait certains lots venus de TPF, ce qui correspondait aux nôtres. Ils ont donc pris en charge les premiers sinistres par des avoirs sur les produits. »
Ceci, avant un changement d’attitude. « Moi, j’étais resté plutôt soft, je peux comprendre qu’un problème survienne. Mais face au grand nombre de sinistres chez des collègues et chez moi, Mirbat n’assumait plus rien et ne voulait plus rien prendre en charge. Puis, de nous accuser, nous ! D’autant que les affaissements font moins de 15 mm et ne sont donc pas pris en compte par les assurances. Du coup, les clients ont porté ces affaires devant la justice. Aujourd’hui, les choses sont entre les mains des avocats. »
Un délai de forclusion dépassé
Pour Chapisere, le déroulé est similaire. « En 2022, Mirbat n’arrivait pas à nous fournir. J’ai donc informé le responsable qualité de chez Mirbat que j’allais me fournir chez un autre industriel. Deux lots de produits m’ont alors été livrés en urgence par Jean-Michel Tognetti. Les sinistres ont commencé à être signalés au début de l’année 2023. Les affaissements sont survenus après le délais de forclusion de deux mois suivant le redressement judiciaire de Mirbat, Il y a donc une demande en justice de relever le délai de forclusion1, afin de déclarer ces créances auprès de Mirbat.
Les assurances n’ont pas été assez rapides pour répondre aux clients. De ce fait, ces derniers poursuivent Chapisere en justice. Ce qui est certain, c’est qu’il s’agit des mêmes lots de produits TPF fabriqués par Mirbat que chez nos confrères. Nous avons alors fait analyser les autres produits du groupe et nous nous sommes rendu compte que le produit livré et vendu comme du Plixxent, n’en était pas. »
Des produits vendus pour d’autres
Dans les Alpes-Maritimes, la mésaventure est similaire pour l’applicateur resté anonyme. « Quand j’ai commencé mon activité l’année dernière, je connaissais la réputation de Mirbat, puisque les premières affaires étaient déjà sorties. Mais j’ai fait le choix de la confiance, tout en précisant bien que je ne voulais pas de produits TPF, mais du Plixxent. C’est ce qui figurait sur mes bons de livraison et sur mes factures. A un moment, j’ai repéré une différence entre les numéros de lots de mes cuves et les numéros sur les certificats d’analyses. J’avais déjà remarqué que les scellés avaient changés. J’ai fait des prélèvements par huissier et j’ai tout envoyé à Plixxent qui m’a précisé que ce n’était pas leur produit. J’ai tout de suite appelé Mirbat et j’ai bloqué le paiement des factures. »
La suite, ce sont des échanges tendus. « Du son côté, Mirbat veut que je paie. De mon côté, j’exige le remboursement des sommes déjà payées pour la marchandise non conforme à la facture. Mirbat a aussi repris ses camions et ses machines. Mais je m’y étais préparé en trouvant d’autres fournisseurs. Ce que je veux surtout, c’est qu’il prenne en charge d’éventuels futurs sinistres. »
1Déchéance d’un droit non exercé dans les délais prescrits.